15 décembre 2005

Le chantage à l'emploi par les délocalisations est la déclinaison micro-économique du NAIRU au niveau macro-économique...

Je rebondis sur l'actualité pour illustrer ce point. Partout dans les médias aujourd'hui, on fait écho à cette information: Bosch France annonce ce mercredi que la société envisage de négocier un retour aux 40 heures par semaine afin de "maintenir l'emploi industriel" des 10.000 salariés français du groupe. Nouvel épisode du film, puisqu'en juillet 2004, les salariés de l'usine Bosch de Vénissieux avaient validé un accord sur le passage à 36 heures payées 35 sous la menace d'une délocalisation. Une brèche étant ouverte, pourquoi ne pas l'agrandir?
Imaginez une telle annonce dans un contexte de "plein emploi" ! Inimaginable. Le NAIRU crée bien les conditions opérationnelles pour que de telles mesures soient désormais envisagées. La mobilité des capitaux et les possibilités offertes aux grands groupes pour délocaliser renforcent évidemment le cocktail.
Le cas Bosch, comme celui de Hewlett Packard et d'autres moins opportunément médiatisés, illustre une vérité que les salariés, AINSI QUE LES SYNDICATS (qui historiquement, et à l'exception de quelques timides initiatives, comme la création assez récente de la CGT chômeurs, ne se sont jamais engagés dans une représentation des chômeurs) feraient bien de méditer: la problématique du chômage les concerne tout autant, sinon plus, que les chômeurs. Faire le gros dos et se replier dans une attitude individualiste de "Lutte des places" (pour reprendre le titre du livre de Vincent de Gaulejac) n'est sans doute pas la meilleure stratégie. L'attitude de déni consistant à donner crédit aux thèses manipulatrices actuelles selon lesquelles les chômeurs seraient des profiteurs fainéants (ce que "Moi, salarié en poste, bien sûr, je ne suis pas; car Moi, je me bouge, Moi ça ne peut pas m'arriver, je ne fais pas partie de cette catégorie là... je vais bien tout va bien... répète après moi") consiste à se tirer une balle dans le pied, aujourd'hui, demain ou après-demain. Car la menace du chômage amène le chantage à l'emploi qui lui n'a qu'un objectif: viser les intérêts du salariés.
Le chômage et la précarité, ainsi que la Peur fort médiatisée qu'ils inspirent, sont un extraordinaire instrument de pression pour obtenir une docilité contrainte du salarié. Ne pas le voir est un aveuglement regrettable. Le comprendre au travers du NAIRU est un premier pas pour recouvrer la vue...
MISE A JOUR DU 28 DECEMBRE:
Les exemples s'accumulent, mélangeant peur du chômage et menaces de délocalisation (le cocktail du moment). Le dernier en date, habilement médiatisé de nouveau (entre autres sur LCI: encore une fois, pour quel but peut-on se demander, si ce n'est brandir l'exemple comme une menace? A bon entendeur?): l'usine Fenwick de Cenon sur Vienne, où ce sont désormais 17 jours de RTT qui seront repris par la direction sous menace de délocalisation. Lors du reportage, on y voyait des délégués CGT expliquant qu'une centaine de salariés (sur 550) avaient fait pression pour que le syndicat (majoritaire) signe l'accord proposé par la direction, et que certains syndicalistes avaient même reçu... des menaces de mort, manifestement de certains salariés ayant peur de perdre leur emploi!
Encore une fois pourrait-on envisager une telle situation (des salariés menaçant leurs représentants) hors d'une situation de chômage de masse ou celui-ci finit par être considéré comme le "mal absolu", "l'enfer" à éviter par tous les moyens, y compris ceux là?

Comments:
Oui mais d'après Olivier Pastré, le chômage c'est fini, c'est bon maintenant au boulot :
http://www.radiofrance.fr/listen.php?file=/chaines/france-culture/chroniques/pastre/pastre_20051216.ra
(à écouter avec real player avant lundi)

C'est un bon celui-là (Patron de banque je crois mais ça il ne s'en vente pas sur France Culture).
 
Merci pour l'info, je connaissais ce bouquin et j'ai été en contact téléphonique avec son auteur (Gérard Plumier)sur ce thème. Lui a découvert par hasard la définition du NAIRU sur le site du Sénat alors qu'il préparait l'action collective de dépôt de plainte pour discrimination à l'embauche pour critères d'âge (70 cabinets actuellement mis en cause par cette plainte...).
 
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